Etonnante histoire que celle d'Eugene de Salignac: fils d'immigrés français né à Boston, cet employé du département des ponts de New York a photographié pendant 28 ans les ouvrages d'art de la Big Apple sous tous les angles. Sans avoir au départ aucune compétence particulière en matière de photographie, mais avec, très rapidement, un regard singulier et un talent certain allant bien au-delà de ce qui n'était au départ qu'un travail d'archiviste municipal,  de Salignac a fini par obtenir une reconnaissance posthume mais amplement méritée, et ses innombrables clichés sont aujourd'hui reconnus à leur juste valeur, tel ce célébrissime Brooklyn Bridge showing painters on suspenders, pris le 7 Octobre 1914. Enjoy.

Charles C. Ebbets est le photographe qui a fini par être reconnu (en 2003, quand même) comme étant l'auteur du fameux Lunch atop a Skyscraper, le célèbre cliché de ces ironworkers new yorkais cassant la croûte sur une poutre métallique suspendue au dessus du vide pendant la construction du Rockefeller Center, en 1932. On le voit ici avec son assistant dans un autre cliché iconique, au 61ème étage du Chrysler building cette fois-ci, tranquillement installé sur la gargouille American Eagle, prêt à faire d'autres photos. Love it.

Parmi tous les skyscrapers de NYC, l'un des plus étranges et des plus emblématiques est sans nul doute le Flatiron sur la 23ème rue à Manhattan. Construit entre 1885 et 1902, ce très photogénique immeuble en forme de fer à repasser est très vite devenu le point de rendez-vous des voyeurs new yorkais! En effet sa forme atypique et la proximité des autres immeubles provoquaient de très violentes et imprévisibles bourrasques susceptibles à tout moment de soulever les jupons des élégantes qui s'aventuraient dans la rue. De quoi révéler une cheville ou le haut d'une bottine, ce qui suffisaient à émoustiller la gent masculine et à provoquer attroupements.. et intervention des forces de l'ordre.

A grizzly bear of a man

Le Lower East Side encore, mais avec l'AntiFolk-Rocker Jeffrey Lewis et son chouette clip sur Back to Manhattan, issu de son septième album sur Rough Trade, Manhattan, paru en 2015. Et en plus il sera en concert à Lille avec son groupe le 9 Mai à La Péniche! Kool..

Né à Manhattan et élevé dans le Bronx, Ralph Morse est l'un de ses grands photojournalistes qui semblent avoir été partout au bon moment, traversant le vingtième siècle avec un flair certain et un oeil toujours curieux, de ses débuts new yorkais pour Life Magazine à ses travaux majeurs sur les deux théâtres d'opérations de la Seconde Guerre Mondiale ou avec la NASA. Il a aussi bien évidemment photographié sa ville sous toutes les coutures, comme ce bout de trottoir de Spanish Harlem avec ses façades tristouilles transcendé par une dynamique partie de stickball, le baseball de rue de tous les gamins de NYC.

La Pierce-Arrow de Mr Perkins, toute en rondeurs streamline, sort tout droit des 1930's, et ses courbes contrastent joliment avec la rigueur de l'arrière-plan, ou même la gestuelle du piéton saisi en pleine action est parfaitement alignée avec les lignes tendues des cages d'escaliers de ce quartier de Harlem, photographié par un autre grand, Todd Webb, en 1946, un an à peine après son emménagement à New York et ses débuts de photographe professionnel. Enjoy.

Né à Brooklyn et décédé à New York il y a deux ans à l'âge de 96 ans, le photojournaliste et collaborateur du New York Times Arthur Leipzig a été l'un des grands photographes de rue de NYC ainsi qu'un membre important de la Photo League, ce regroupement de photographes new yorkais mêlant le social et l'artistique qui vit également passer dans ses rangs des grands comme Sid Grossman ou Robert Frank. Je ne me lasse pas de ce cliché de gamins jouant sur un bout de rue de Brooklyn recouvert de dessins à la craie, datant de 1950, et trouvé sur la chouette page de Laura Moazedi consacrée au Hopscotch (la marelle!).

image copyright © Arthur Leipzig - Arthur Leipzig Official Website

Un classique du genre. The Warriors (Les guerriers de la nuit, en v.f.), film de Walter Hill sorti en 1979, est l'archétype du "film de gangs" des 70's et a été depuis sa sortie une source d'inspiration constante pour une floppée de punkrock bands qui ne se sont pas gênés pour repiquer gimmicks esthétiques et noms de groupes (The Baseball Furies!), entre autres. Un bon film d'action avec un contenu sociologique pas inintéressant, la cavale des Warriors - accusés à tord du meurtre d'un des leaders du très puissant gang des Gramercy Riffs -  du Bronx à Coney Island, traqués par tous les autres gangs de la ville, dépeint le New York mal famé et dangereux de l'ère pré-Giuliani et évoque furieusement les photos des Savage Skulls prises par Jean-Pierre Laffont dans le Bronx au début des 70's.

The Groupies s'est formé dans le Lower East Side au début des sixties et est vite devenu l'un des garage bands les plus en vue de NYC, avec une solide réputation en live due autant à la régularité de leurs prestations dans les nighclubs new yorkais qu'à l'originalité de leur approche du blues et de r'n'r. Trop original pour le grand public, en fait, et le groupe ne durera pas, malgré le soutien actif de pointures comme Ahmet Ertegun. Leur single de 1966 paru sur Atco, par contre, est devenu un cult-classic depuis les 80's - et la reprise par les Cramps - de ce monstrueux et glaçant Primitive. Un youtubeur a eu la bonne idée il y a quelques années d'en faire la bande-son d'un mashup ultra-chaud, puisque basé sur une vidéo d'époque d'une performance particulièrement  lascive et caliente de la grande Blaze Starr. Salivez.

Au coeur de Manhattan, Time Square est le lieu de rendez-vous favori des new yorkais et des touristes. Dès q'un événement à portée mondiale a lieu, les foules y convergent pour partager informations et émotions, les yeux rivés aux écrans géants. Rien de tel le 6 juin 1944, mais les habitants de la Big Apple se sont tout de même rassemblés sous le bandeau défilant et apprennent le débarquement, quelques heures plus tôt, des troupes alliées sur les plages de Normandie.

NYC 1977, toujours. La Disco triomphe et le Punk pointe le bout de son nez sale dans une mégalopole dangereuse et en pleine déliquescence. La canicule et la grêve des éboueurs ont mis les new yorkais à cran, et la terreur distillée par le .44 Caliber Killer, de son vrai nom David Berkowitz - le tueur en série bientôt plus connu sous le nom de Son of Sam, qui assassine de préférence des jeunes femmes brunes dans leurs voitures - contribue à faire grimper la tension. Le 13 Juillet, la quasi-intégralité des cinq boroughs de New York subit une panne d'éléctricité gigantesque, qui entraîne pillages et incendies volontaires pendant 25 heures d'affilée, dans une atmosphère de fin du monde. C'est le New York dépeint par Spike Lee dans son excellent Summer of Sam (2000) et par Garth Risk Hallberg dans son très dense et somptueux premier roman paru il y a peu, City On Fire. La photo ci-dessous montre une rue de Bedford-Stuyvesant, l'un des quartiers de Brooklyn, peu après le début des pillages.

Classic Ramones picture! 1977, les quatre brudders au CBGB's, en pleine action, l'archétype new yorkais du punk rock'n'roll seminal et du groupe de losers par excellence, mais une légende absolument intouchable aussi! Enjoy.

Se définissant lui-même comme un "archiviste du déclin", le photographe new yorkais Camilo José Vergara s'est spécialisé dans la photographie des quartiers à l'abandon ou en déshérence des grands centres urbains américains, tel Détroit ou New York, estimant que les lieux parlaient souvent davantage que les visages. Le résultat de son travail à très long terme (il rephotographie les mêmes endroits - les projects de Chicago, le South Bronx de NYC, ... - à plusieurs années d'intervalle) constitue un témoignage précieux sur l'évolution urbaine des quartiers les moins glamours et sur la vie des ses habitants. J'adore celle-ci, pour les deux gamins au premier plan et pour la Plymouth 57 décrépite et déglinguée à droite, qui pourrait être la Christine du film de John Carpenter, entre deux "auto-reconstructions"...

Avenue C, Lower East Side, Manhattan, NYC, 1970 by Camilo José Vergara