Il y a presque quarante ans, ma vie basculait définitivement dans ce puits sans fond qu'est le rock'n'roll - tendance sauvage, allumé, hors-limite, débridé, psycho-sexuel et lycanthrope - grâce aux premiers lps des Cramps et de quelques autres, et, bien accompagné par Lux & Ivy je plongeais vite les oreilles les premières dans les fantastiques poubelles du rockabilly, du garage punk et du rhythm'n'booze des origines avec un plaisir jouissif jamais démenti depuis. Le couple infernal m'a fait réaliser à quel point ces genres musicaux étaient d'une richesse insoupçonnable, et que les frissons les plus extrêmes venaient le plus souvent de la marge, de cette twilight zone du rock'n'roll, tragiquement méconnue et terriblement sous-estimée..

Aujourd'hui nombreux sont celles et ceux qui, passés comme moi de l'autre côté du miroir (posé sur la porte verte), gardent jalousement ce trésor rien que pour eux, et je comprends les réactions agacées des fans hardcore des Cramps façe à l'avalanche de commentaires plus ou moins justes, inspirés ou à côté de la plaque suscités par les partages, sur les réseaux sociaux, de cette fameuse scène tirée de Woe What A Night, l'épisode 4, saison 1, de la sympathique série pour ados pilotée par Tim Burton qu'est Wednesday (le dernier gros succès/machine à buzz Netflix en date). Mais  je ne peux que me réjouir du fait que, peut-être, parmi ses zillions de teens qui craquent ces jours-ci sur la chorégraphie de Jenna Ortega possédée par le Goo Goo Muck, quelques-un(e)s, entendant l'appel du Wighat, auront la curiosité nécessaire et l'envie d'aller un cran au delà, intrigués et séduits par l'incommensurable puissance évocatrice, primitive et férale du chant prédateur de Lux, des riffs tranchants de Kid Congo et de Poison Ivy, et du drumbeat monomaniaque de Nick.

Et, qui sait? Peut-être qu'une infime poignée de cette minorité de jeunes et curieux aventuriers poussera le bouchon toujours plus loin, découvrant jours après nuits les fantasmabuleux joyaux noirs - stay sick, turn blue - enregistrés décennies après décennies par certains de leurs prédécesseurs, tel Ronnie Cook & The Gaylads, responsables en 1962 du Goo Goo Muck originel, repris et transfiguré par nos héros éternels sur Psychedelic Jungle, leur second album, en 1981..

Yep, quoi qu'on en dise, le  Rock'n'Roll est peut-être bel et bien mort, mais son cadavre vibre, oh ma soeur, encore et encore.

The Cramps - The Goo Goo Muck

Ronnie Cook & The Gaylads - The Goo Goo Muck

Wednesday, Episode 4, Saison 1 - Wednesday Addams dancing to the Cramps

Un album et une poignées de singles et de EPs à l'actif de ce groupe originaire d'Akron, la caoutchouteuse capitale du pneumatique made in the USA. The Bizarros s'est formé vers 1976 au lycée et le quintet s'est vite stabilisé autour du noyau de potes qu'étaient Terry Walker, Rick Garberson, les frangins Don et Jerry Perkins et Nick Nicholis, ce dernier lançant, pour sortir leurs premiers vinyles, le label indé Clone Records. Un label pionnier à l'époque, localement "DIY" avant l'heure, et qui aidera également au démarrage de quelques combos locaux, contribuant ainsi au dévelopement des scènes punk/new wave d' Akron et de la métropole voisine, Cleveland (Rubber City Rebels, Pere Ubu, Dead Boys, Devo,..), jusqu'à la fin de label en '81.

Le groupe s'est rapidement dissous, pour les raisons habituelles, mais ses membres sont restés proches et Nicholis réactive sporadiquement son label pour sortir ce qui lui tient à coeur, notamment le second lp des Bizarros en 2003 (Can't Fight Your Way Up Town From Here) et le récent second split-lp de son groupe (après leur debut, From Akron, partagé avec les Rubber City Rebels en 1977), avec cette fois-ci, The Bad Dudes, un autre combo d'Akron.

La piste totémique du groupe? Probablement ce Young Girls At The Market, pure punkrocker tout en aggressivité contenue, qui encore aujourd'hui tient son rang face aux classiques made in Detroit et NYC de la même période. Enjoy.

The Bizarros - Young Girls At The Market

1975. Le hard-driving rhythm'n'blues rock'n'roll taillé pour le pub de Doctor Feelgood, au sommet, en session live pour la BBC, quatre ans après la formation du groupe à Canvey Island. Au programme: She Does It Right, instant classic qui ouvre leur premier album, Down By The Jetty, paru cette même année. Lee, Sparks, The Big Figure et bien sûr le chop, chop, chop de la Telecaster de John Peter Wilkinson, unique, impérial, inégalable. Déjà posté sur ce blog, je sais, mais who cares.. Rock In Power, Wilco, you Rock'n'Roll Berserker.

Doctor Feelgood, She Does It Right

 Wilco en 1984, avec la piste qui ouvrait son deuxième lp en solo, Pull The Cover, paru sur Skydog Records, et trente ans plus tard, revisitant ses propres classiques avec Roger Daltrey au chant, sur Going Back Home. Rock in Paradise, Mr. Johnson.

Wilco Johnson - Muskrat

Wilco Johnson & Roger Daltrey - All Through The City

Réveil en douceur ce samedi matin avec GA-20, Boston's most famous Blues power trio, et ce splendide Dry Run tiré de leur tout récent troisième lp, Crackdown. Le combo monté par Pat Faherty et Matthew Stubbs il y a quatre ans était en concert hier soir à Roncq dans le cadre du festival Jazz en Nord, et malgré l'inédaquation totale de la salle (public assis.. beurk), on a passé un très bon moment sur fond de reprises de Hound Dog Taylor et d'originaux très souvent bien rock'n'roll, jusqu'au final - debout devant la scène à danser comme des fous, quand même, hein - asséné à coups de Let's Get Funky et de Shake Your Moneymaker. Well done, gents!

GA-20 - Dry Run

Un real kewl aperçu du futur album (prévu pour 2023) des Limboos, nos Latin Soul Rockers madrilènes favoris, right now à l'heure du p'tit déj, via une nouvelle vidéo et un nouveau titre, Red Line, ma foi bien groovy et addictif! Enjoy.

Aussie rock'n'roll at its best.. The Masters Apprentices - "[because] we are apprentices to the masters of the blues—Chuck Berry, Bo Diddley, Jimmy Reed, Elmore James and Robert Johnson" (Mick Bower, le guitariste rythmique du groupe, en 1966), from Adelaide puis Melbourne, avec leurs deux premiers singles, Undecided, une piste bien garage écrite en un quart d'heure et ainsi titrée parce que  le combo n'arrivait pas à se décider sur un nom, et Buried & Dead,  juste avant le virage psyché, puis prog rock au début des 70's. Enjoy.

The Masters Apprentices - Undecided

The Masters Apprentices - Buried & Dead

Robert Finley - Make Me Feel Alright

Darling Buds Of May @ Le Poche, Béthune.

Robert Finley - Country Boy

Darling Buds Of May - I Saw The Light

Rock'n'Roll is Alive in New York City! Encore un hymne à la grosse pomme tombé dans l'oubli et qui mérite d'être (re)découvert - combien de petites perles de ce qualibre sont encore coincées au fond des poubelles de l'histoire? Je m'interroge et ensuite je réappuie sur play et c'est reparti pour un tour, mon pote, rien de tel qu'un bon shot de punkrock, nuyawk style pour se mettre en phase avec le weekend, entre l'heure du dernier café du matin et celle du l'apéro qui pointe le bout de son museau. Leon Matthews, a.k.a. Neon Leon, naviguait dans les mêmes eaux troublées que les magnifiques créatures (de Cherry Vanilla à Wayne/Jayne County en passant par Joey, Johnny, Dee Dee, Debbie et les autres) qui hantaient le CBGB's et Max's Kansas City, et a par la suite enregistré quelques singles et un album dans les années '80, mais rien que ce premier single de 1979 suffit à ce qu'on fasse l'effort de se remémorer son nom, non? Enjoy.

Neon Leon - Rock'n'Roll is Alive in New York City

Ouhhhh.. Belle décharge freakbeat avec solo qui part en vrille psyché et effets visuels vintage bien grooooooovy! On est en 1967, Sharon Tandy a depuis quelques temps déjà quitté sa Johannesburg natale et a tenté sa chance au Royaume Uni et même aux States (via des pistes gravées chez Stax, carrément), mais elle ne perçe pas vraiment et finit par retourner en Afrique du Sud, ou elle redémarrera une carrière plutôt fructueuse, à l'échelle nationale, dès les 1970's. Restent quelques bons titres sur la période qui nous titille le plus ici aux RKT headquarters, dont ce chouette single Hold On b/w Daughter Of The Sun, bien pêchu et revigorant. Enjoy.

Sharon Tandy - Hold On

Sharon Tandy - Daughter Of The Sun

Belle Plaine, c'est le joli pseudo de Mélanie Hankewich, un pseudonyme emprunté à un petit village du Saskatchewan situé à quelques kilomètres de la capitale, Regina, qu'on évoquait déjà lundi dernier via le post consacré à Colter Wall. La Belle country-folk singueuse canadienne appartient d'ailleurs à cette même famille musicale d'artistes et de musiciens (Colter Wall, The Death South,..) qui collaborent régulièrement et revivifient l'Americana en l'adaptant aux thèmes et préoccupations de leur génération, sans pour autant rejeter la tradition. Trois albums à son actif depuis 2012, dont son tout dernier Malice, Mercy, Grief and Wrath (2018) dont j'ai extrait la première piste, plus une vidéo en live avec Blake Berglund (autre émérite musicien local) histoire de souligner le bon goût de la dame - Quiconque reprend avec ce genre de talent le fabuleux Mercury Blues de David Lindley mérite tout l'attention de RKT!

Belle Plaine - Laila Sady Johnson Wasn't Beaten By No Train

Belle Plaine & Blake Berglund - Mercury Blues

Alley Hop, juste pour le fun ce dimanche matin, un top five de titres évoquant de près ou de loin la marque créée par Henry Ford il y a presque 120 ans. Fasten your seatbelts and enjoy the wild ride..

Quand Chuck Prophet vous invite a grimper dans son two-tone (Green On Red??) 1985 Ford Econoline, vous n'hésitez pas une seconde, n'est-ce pas? Même si le vieux fourgon tient plus du workhorse cabossé que du custom van radical et qu'il consomme trop d'huile, un road trip avec ce grand monsieur de la musique populaire américaine, c'est la garantie d'une vibrante et vivante relecture de tous les fantasmes de ce pays autant aimé que détesté..

Chuck Prophet - Ford Econoline

Chuck Prophet & The Mission Express

Dès 1925, la FoMoCo s'implante, via sa filière canadienne, en Australie, et la première Ford-T sort cette même année de l'usine d'assemblage de Geelong. Pendant les fifties, Ford Australia produit sa propre version de la Customline américaine, une version qui diffère par des détails cosmétiques mais qui bénéficie en 1955 du tout nouveau V8 Y-Block, un moteur moderne et puissant, et bien plus attractif pour les futurs revheads locaux que les modèles issus de la branche britannique de Ford. Pas étonnant que The Bam-Balams, groupe de Sydney qui sorti un seul et unique album,  Genuine Rock & Roll Medicine Show, et une demi-douzaine de singles entre 1884 et 1992, préfèrent en '90 conclure avec ce chouette tribute à la success story de la marque concurrente d' Holden, l'ennemi héréditaire down under..

The Bam-Balams - Ford Customline

Quoi de plus cool qu'une real kewl déclaration d'amour à sa propre voiture? L'une de mes favorites dans le genre c'est ce chouette et enlevé folkrocker signé Phranc, sur le troisième lp de l'androgyne folkpunkeuse Angelano paru en 1991, Positively Phranc. "It's not crazy for a girl to love her car".. ben non, surtout une Ford - n'importe quel modèle - des mid-sixties!

Phranc - '64 Ford

The Cowslingers

Bon, ceci dit, on peut aussi rouler kewl dans une caisse pourave, hein? Suffit d'avoir un album des Cowslingers dans le lecteur et de chanter à tue-tête avec Greg Miller sur l'un de leurs excellents cowpunkers de la bonne époque (2002), comme ce '88 mustang, tiré du quatrième album des flamboyants flingueurs de Cleveland, Ohio,.. My car is a piece of shit - but so is yours!

The Cowslingers - '88 Mustang

Zeke

En à peine un peu plus d'une minute mais à - précisément! - 124 miles an hour (!) - Zeke met la pedal to the metal en 1994 avec cette furiosité speedpunk hommage à la grosse fullsize musclée de la marque de Dearborn, sur son premier lp, Super Sound Racing - Pas de 302 Cubic Inch V8-Powered Blues cette fois-çi pour le combo hardcore de Seattle, Washington, mais un good unclean fun sous amphét' et le plaisir simple du going nowhere fast au volant de sa Galaxie 500,  in style...

Zeke - Galaxie 500

Jeune combo né en 2010 à Immingham, UK, The Ming City Rockers fait tout ce qu'il peut depuis pour fuir ce port industriel et ce patelin paumé au bord de l'estuaire Humber, au nord-est de l'Angleterre - le genre d'endroit où tu te fais chier comme un rat mort quand t'es ado mais qui, typiquement, peut te pousser à chercher ta propre voie (voix) en explosant le carcan local et rassis qui constitue ton seul horizon. Le quatuor à géométrie variable - autour de son androgyne chanteur/teuse-guitariste Clancey Jones - balance donc, depuis sa création, un punkrock teinté de glam trashy, de power pop déviante et de post-punk with a twist, agile et rigoureusement iconoclaste. Quelques singles et deux albums (leur self-titled debut en 2014, et Lemon en 2016) témoignent d'un talent certain pour torcher des pistes aussi rentre-dedans que subtilement addictives, aux lyrics bien futés, aussi incisifs qu'acidulés. Et à l'écoute de leur nouveau single, Jill Was An Anarchist, disponible sur le web depuis le 19 octobre (un autre morceau, Desperate, sera dévoilé dans trois jours) on ne peut qu'attendre avec impatience et gourmandise la parution de leur troisième album, Lime (uh uh, je sens une certaine continuité thématique et fructophile, là, non?), prévue pour le 25 janvier prochain. Enjoy.

The Ming City Rockers - Jill Was An Anarchist

The Ming City Rockers - Twist It

Some Lousiana / Chicago Blues aujourd'hui, avec le maître de l'harmonica Little Walter et cette piste bien kewl (aussi intitulée Hate To See You Go) qui n'a pas eu à l'époque l'impact de ses hits (l'instrumental Juke, 1952, et le carton My Babe, trois ans plus tard), mais qui me fait mon mardi matin malgré tout! Enjoy.

Little Walter - Come Back Baby

Real Kewl Country Folk & Gothic Americana tout droit sorti du Canada, plus précisément de Swift Current, Saskatchewan - le simple fait de taper le nom de cette ville et de cette province m'emporte direct dans mon Amérique du Nord fantasmée.. - le jeune Colter Wall et sa voix hors d'âge nous transportent, à tous les sens du terme, et le paysage mental qu'il crée à travers ses lyrics n'est pas sans évoquer celui de The Dead South, ses voisins de Regina, dans la même province, qui collaborèrent d'ailleurs avec lui sur Imaginary Appalachia, son premier EP sept-titres de 2015. Trois albums ont suivi depuis, son self-titled debut en 2017, Songs Of The Plains en 2018 et le dernier en date, Western Swing & Waltzes And Other Punchy Songs, paru en 2020. Sleeping On The Blacktop est probablement son titre le plus connu, ayant bénéficié de la caisse de résonnance "soundtrack de film / série télé", notamment via Hell Or High Water, l'excellent néo-noir western écrit par Taylor Sheridan (Sicario, Wind River,..) et rebaptisé Comancheria en France, ou encore les séries Yellowstone et, tout récemment, The Peripheral. Mais tout le reste de son catalogue vaut largement le détour!

Colter Wall - Sleeping On The Blacktop

Colter Wall - Evangelina (Hoyt Axton Cover)